Le jeu de Scrabble a été inventé, comme le Monopoly, lors de la grande dépression économique américaine. On doit l’invention à Alfred Moscher Butts, un architecte au chômage à cette époque trouble.
Il donne initialement au jeu le nom de LEXIKO. Le jeu se base sur les mots croisés, apparus pour la première fois aux Etats-Unis en 1913 dans le New-York Times avant de s’étendre dans nos contrées européennes en 1926.
Le LEXIKO est un jeu de lettres tirées au hasard avec lesquelles il faut composer des mots en les croisant sur un plateau. La première version qu’Alfred Butts teste avec son épouse, Nina, en 1930 sort au public en 1931.
Le succès n’est pas immédiat, loin s’en faut. Les règles ne sont pas encore telles que nous les connaissons aujourd’hui. Trop près des mots croisés. Pourtant les principes de base, dont le plateau, sont là : 7 lettres à tirer et placer sur un plateau de 225 cases avec une valeur de lettres telle que maintenant.
Ce qui allait devenir le scrabble prend sa forme quasi définitive en 1933. Butts tente alors de le commercialiser sans réel succès. Les fabricants de jeux ne sont pas près à se lancer dans la production d’un jeu jugé lent et trop intellectuel (de l’avis même de la société Parker Brothers, l’éditeur du Monopoly).
Pourtant, les quelques exemplaires fabriqués remportent l’adhésion de leurs joueurs. Le bouche à oreilles fait le reste.
C’est ainsi qu’en 1939, alors qu’Alfred Butts est rattrapé par le collier par un administrateur de la ville de New-York, James Brunot, alors qu’il a presque renoncé à son idée et qu’il a retrouvé du boulot. Ce dernier, ayant entendu parler du jeu par son assistante, se passionne à son tour pour le Lexiko. Il prend l’initiative de rencontrer Butts et de lier un partenariat commercial avec ce dernier, en lui amenant notamment son réseau fourni et sa notoriété.
Tous deux revoient les règles et la mécanique de jeu pour aboutir à la version définitive. Cette fois, c’est la bonne !
C’est alors un rebelotte pour trouver des fabricants, un réseau de distribution et tout le fatras nécessaire à la commercialisation du jeu, sans plus de succès. La seconde guerre mondiale a éclaté. Personne ne veut les suivre. Ca attendra la fin de la guerre.
A ce moment de l’histoire, Alfred Butts cède ses droits de fabrication à James Brunot contre royalties. Brunot, seul, trouve l’essor nécessaire. Il fonde une société et décide, convaincu du succès du produit, de fabriquer lui-même les plateaux. 18 plateaux par jour fabriqués à la main, en bois d’érable vernis. Un brevet est déposé en 1948, d’abord pour le principe du jeu, puis le 16 décembre de la même année pour le nom du jeu : SCRABBLE.
Cette même année, l’entreprise est gravement déficitaire. Brunot s’apprête à lâcher l’affaire. Les 2251 exemplaires vendus ne suffisent pas à faire vivre la boîte.
C’est à cet instant que le hasard rattrape de nouveau le Scrabble. Après qu’il ait pris quelques jours de congés, James Brunot découvre que les habitants de la ville de Newton (Connecticut) où il réside parlent du jeu avec enthousiasme, sans publicité ni autre forme de promotion.
Tant qu’à être endetté jusqu’au cou, le sieur Brunot met le paquet. Il achète des locaux plus spacieux et industrialise la production. Grand bien lui fait puisque dès 1949, 37000 exemplaires du Scrabble sont vendus chaque trimestre !
En 1952, un nouveau coup de boost est donné à l’affaire grâce à Jack Strauss, le responsable du magazin Macy’s de New York qui ne comprend pas pourquoi le Scrabble n’est pas dans ses rayons. Cette présence en magasins fait grimper les ventes en flèche au point de couler la chaîne de production qui ne suit plus avec ses 6000 boîtes hebdomadaires.
C’est Selchow and Righter, un gros fabricant de jeu mondialement réputé qui reprend la fabrication et permet au Scrabble de conquérir d’abord les USA puis l’Europe avec le succès que l’on connait désormais.
Le Scrabble qui a finit par faire la fortune de James Brunot et Alfred Butts est cédé la compagnie anglaise J.W. Spears & Sons en 1968, vingt ans après le vrai boom des ventes.
James Brunot décède 16 ans après cette cession en 1984. Alfred Butts meurt en 1993, un an avant le rachat par Mattel qui intervient en 1994.
Le scrabble s’est vendu depuis l’origine à près de 200 millions d’exemplaires (comme le Rubik’s). Il est disponible dans plus de 120 pays en une quarantaine de langue.